A5-2b Variations autour des Humanités Numériques : Julien VELCIN - 2H

Comment définir la culture numérique, sinon comme la culture de l’écrit contemporain, avec son lot de technicités pour circuler dans les textes et dans ce qu’on appelle les « données » ? Mais qui alors en a la maîtrise ? L’enjeu est important car nous savons que cette culture de l’écrit est fortement ségrégative et donne à qui le veut le pouvoir d’écrire le monde selon ses valeurs. Nous en constatons les abus aujourd’hui, quand l’industrie numérique se borne à vendre, acheter, louer les humains du monde entier, via leurs propres traces d’écriture sur les réseaux.

Se pose alors la question de l’acquisition collective de cette culture numérique, pour à la fois mettre un coup d’arrêt à ces formes modernes d’esclavage et pour sculpter collectivement le monde selon des valeurs démocratiques : comme par le passé, l’apprentissage de l’écriture semble, pour les analphabètes que nous sommes devenus, la seule issue qui garantisse notre émancipation et le déploiement de notre pensée critique.

En nous appuyant sur les travaux d’anthropologues, de philosophes et d’historiens, mais aussi sur des faits et des pratiques contemporaines, nous contextualiserons et approfondirons cette perspective.

Julien Velcin : aborder la question des catégories à l’aide de l’apprentissage automatique

Julien Velcin, Professeur en Informatique à l’Université Lyon 2 (https://velcin.github.io), propose de parler de la question des catégories par le prisme de l’apprentissage automatique (machine learning). La catégorisation des objets est une question centrale dans plusieurs disciplines des sciences sociales et humaines (SSH). C'est pourquoi nous pouvons penser à première vue que l'apprentissage automatique est un atout majeur à une époque où l'accès à l'information ne cesse de croître. Cependant, il s'avère que de nombreux écueils nous empêchent généralement de tirer parti d'outils très puissants : manque de données pertinentes, mauvaise définition ou coût prohibitif d'une annotation manuelle, etc. Qui plus est, la tâche même de catégorisation peut être mal définie et entraîner une perte de temps considérable, sans même parler des biais pouvant venir corrompre le processus d’apprentissage et provoquer des discriminations dont peuvent souffrir des individus bien réels. J'expliquerai ce que j'entends par « dilemme de la catégorisation » et je donnerai plusieurs illustrations provenant de précédents projets collaboratifs et pluridisciplinaires.